LES VISITEURS DU SOIR

 

Quand Eragon se réveilla de sa sieste, le soleil se couchait dans un ciel doré, réchauffant la chambre d’agréables rayons orangés et rouges. Le garçon se sentait bien ; il n’avait guère envie de se lever. Il somnola donc jusqu’à ce qu’il sente la température baisser. Le soleil disparut derrière l’horizon, éclaboussant la mer et le ciel d’une dernière flaque de couleurs. « L’heure approche ! » songea Eragon.

Il prit son arc et son carquois, mais laissa Zar’roc dans la chambre. L’épée ne ferait que le ralentir, et il n’était pas pressé de s’en servir. S’il lui fallait se débarrasser d’un ennemi, la magie ou une simple flèche devrait suffire. Il enfila son pourpoint, le laça soigneusement, et attendit avec nervosité que la nuit fût tombée.

Il sortit alors dans le couloir, l’arc à l’épaule. Brom l’y rejoignit, armé d’une épée, un bâton à la main. Jeod, vêtu lui aussi d’un pourpoint et de chausses noirs, les attendait à l’extérieur. Il portait au côté une rapière élégante et une bourse en cuir. Le conteur observa la lame de son ami.

— Ce joujou est trop fin pour un vrai combat ! Que feras-tu si ton adversaire brandit un glaive ou une flamberge[5] ?

— Sois réaliste, rétorqua Jeod. Aucun garde n’a de flamberge ; et ce « joujou » est plus vif qu’un glaive !

Brom haussa les épaules :

— C’est ta peau, après tout.

 

Les trois complices avancèrent dans les rues, évitant vigiles et soldats.

Eragon était tendu. Son cœur cognait. En passant devant la boutique d’Angela, il perçut du coin de l’œil un mouvement sur le toit de l’herboriste. Sa paume le picota. Alerté, il examina l’échoppe ; mais il ne vit rien.

Brom mena ses compagnons le long du rempart de Teirm. Lorsqu’ils parvinrent à la forteresse, le ciel était noir. Les murailles encerclant la citadelle firent frissonner Eragon. Pour rien au monde il n’aurait voulu être emprisonné là.

Au pied du château, Jeod prit la tête du groupe en silence. D’un air aussi dégagé que possible, il frappa à grands coups contre le portail et attendit. Le petit judas grillagé s’ouvrit, et le visage renfrogné d’un garde apparut.

— Ouais ? grogna-t-il.

Son haleine empestait le rhum.

— Faites-nous entrer, dit Jeod.

— Pour quoi faire ?

— Ce garçon a oublié un objet de grande valeur dans mon bureau. Nous devons le récupérer immédiatement.

Eragon baissa la tête et prit un air honteux. Le garde fronça les sourcils, visiblement impatient de retrouver sa bouteille.

— Pfff, ça ou autr’chose…, marmonna-t-il. Mais oubliez pas de lui donner une bonne correction d’ma part !

— Je n’y manquerai pas, promit Jeod tandis que l’homme déverrouillait une petite porte incrustée dans le portail.

Ils entrèrent. Brom donna quelques pièces au garde, qui grommela un remerciement avant de s’éloigner en titubant.

Dès que la silhouette du garde eut disparu, Jeod guida ses compagnons dans la partie principale du château. Ils se hâtèrent vers leur destination, l’oreille aux aguets pour repérer d’éventuelles rondes de sécurité. Eragon avait dégainé son arc.

Lorsqu’ils parvinrent devant la salle des registres, Brom essaya de pousser la porte. Elle était fermée à clef. Le vieil homme appuya la main contre le battant et prononça un mot qu’Eragon ne connaissait pas. Il y eut un léger déclic et la porte s’ouvrit. Brom s’empara d’une torche accrochée au mur, et tous trois se glissèrent dans la pièce, refermant sans bruit derrière eux.

La salle était remplie de casiers en bois dans lesquels s’empilaient des rouleaux de parchemin. Une fenêtre munie de barreaux était creusée dans le mur du fond.

Jeod passa entre les casiers, regarda les rouleaux, et s’arrêta à l’autre bout de la pièce.

— Par ici ! chuchota-t-il. Voilà les registres du commerce maritime des cinq dernières années. La date figure sur les sceaux en cire, sur le coin.

— Que fait-on, à présent ? demanda Eragon, soulagé qu’ils aient réussi à se faufiler jusque-là.

— On commence par le haut. Certains rouleaux ne concernent que des histoires de taxes ; ceux-là ne nous intéressent pas. Cherchons ce qui fait mention de l’huile de Seithr.

Le marchand sortit un parchemin de sa bourse, l’étala par terre, puis posa à côté une bouteille d’encre et une plume.

— Pour noter nos découvertes…, expliqua-t-il.

Brom s’empara d’une pile de rouleaux dans le casier supérieur et les entassa sur le sol. Il s’assit et déroula le premier. Eragon l’imita, s’installant de manière à garder la porte dans son champ de vision. Le travail se révéla à la fois fastidieux et difficile. L’écriture cursive courant sur les archives n’était pas aussi nette que les caractères d’imprimerie avec lesquels il avait appris à lire.

En se fiant au nom des bateaux qui circulaient dans les mers du Nord, ils exclurent de nombreux rouleaux. Même ainsi, ils avançaient lentement, notant avec soin toute référence à un chargement d’huile de Seithr.

Le château était plongé dans un silence à peine troublé de temps en temps par les pas du vigile. Soudain, Eragon eut la chair de poule. Il s’efforça de se concentrer sur son travail, mais la sensation de malaise persista. Agacé, il releva la tête… et sursauta. Un gamin aux yeux bridés était accroupi sur le rebord de la fenêtre, à l’extérieur. Une branche de houx était glissée dans sa chevelure brune en broussaille. Une voix s’éleva dans la tête d’Eragon : « Tu as besoin d’aide ? »

Le garçon tressaillit : on aurait dit la voix de Solembum.

« C’est toi ! » demanda-t-il, incrédule.

« Qui d’autre »

« C’est que… tu ne lui ressembles guère ! »

Le gamin sourit, découvrant des dents pointues : « Qu’importe à qui je ressemble ? Ce qui compte, c’est qui je suis. Je ne suis pas un chat-garou pour rien… »

« Que viens-tu faire ici ? »

Solembum pencha la tête, comme s’il réfléchissait : la question méritait-elle une réponse ? Finalement, il lâcha : « Ça dépend de ce que toi, tu viens faire ici. Si tu déchiffres ces registres pour le plaisir, alors, je n’ai nulle raison d’être là. Mais si ta présence est illégale et si tu ne souhaites pas être découvert, j’ai bien fait de venir t’avertir. »

« M’avertir de quoi ? »

« Que le garde que vous avez corrompu tout à l’heure a signalé votre présence dans le château à l’officier de relève, et que celui-ci a envoyé des soldats à votre recherche. »

« Merci de l’information. »

« Intéressant, n’est-ce pas ? À toi d’en tiret les conséquences… »

L’enfant se releva et secoua sa tignasse.

« Au fait ! lança Eragon. La dernière fois, que voulais-tu dire, en me parlant de l’arbre et de la voûte ? »

« Exactement ce que j’ai dit ! »

Il voulut le questionner encore, mais le chat-garou avait disparu.

 

Des soldats sont à notre recherche, annonça Eragon à haute voix.

— Comment le sais-tu ! demanda Brom d’un ton brusque.

— J’ai entendu le gardien parler l’officier de relève. Il vient d’envoyer des gardes. Il faut qu’on sorte d’ici, ils ont certainement remarqué que le bureau de Jeod était vide.

— Tu es sûr ? demanda le marchand.

— Oui ! Ils sont en chemin !

Brom prit un autre rouleau dans le casier :

— Tant pis ! Terminons cette rangée.

Ils se hâtèrent de parcourir les archives. Lorsqu’ils eurent terminé, Brom rangea le dernier rouleau à sa place ; Jeod remit le parchemin, l’encre et la plume dans sa bourse ; Eragon attrapa la torche, et ils sortirent précipitamment de la pièce. Au moment où ils refermaient la porte, les bottes des soldats résonnèrent dans le couloir. Ils s’apprêtaient à filer quand Brom siffla entre ses dents ;

— Enfer ! La serrure ! Il posa la main sur le battant, marmonna un mot de l’ancien langage ; un cliquetis se fit entendre. Au même instant, trois soldats en armes apparurent.

— Écartez-vous de cette porte ! hurla l’un d’eux.

Le conteur recula d’un pas, une expression ébahie sur le visage. Les trois hommes fondirent sur eux.

— Pourquoi vouliez-vous entrer dans la salle des registres ? gronda le plus grand des gardes, qui semblait être le chef.

Eragon serra son arc d’une main, se préparant à détaler.

— Je crains que nous ne nous soyons égarés, murmura Jeod.

La peur du marchand était évidente. Une goutte de sueur roula dans son cou.

Les soldats le fixèrent, suspicieux.

— Inspectez cette pièce, ordonna le chef.

Eragon retint son souffle. L’un des vigiles saisit la poignée, l’abaissa, la secoua. Il donna un coup de poing contre le battant avant de conclure :

— C’est fermé, chef.

L’homme se gratta le menton :

— Je ne sais pas ce que vous mijotiez, mais, puisque la pièce est fermée, je suppose qu’on peut vous laisser partir. En route !

Les soldats les encadrèrent et les escortèrent dans la cour. Eragon n’en revenait pas : « Incroyable ! Ils nous ramènent à la sortie… »

— C’est par là ! dit le grand vigile en désignant le portail. Et pas d’entourloupettes : on vous a à l’œil. Si vous avez besoin de revenir, attendez le matin !

— Bien sûr, promit Jeod.

Eragon sentit le regard des gardes dans leur dos tandis qu’ils s’éloignaient rapidement. Dès que la petite porte se fut refermée derrière eux, un sourire de triomphe apparut sur le visage du garçon, qui sauta de joie. Brom le fusilla des yeux :

— Marche normalement ! Il sera temps de te réjouir une fois à la maison.

Rappelé à l’ordre, Eragon adopta une démarche plus calme, ce qui ne l’empêchait pas de bouillonner à l’intérieur…

 

Arrivé dans le bureau de Jeod, Eragon s’exclama :

— On a réussi !

— C’est vrai, grommela Brom. Encore faut-il vérifier si ça valait la peine de courir un tel risque…

Jeod prit une carte de l’Alagaësia sur les étagères et la déroula sur sa table de travail.

À l’ouest, l’océan séparait le pays des terres inconnues. Le long de la côte occidentale se hérissait la Crête, cette immense chaîne de montagnes. Le désert du Hadarac occupait le centre de la carte, et l’extrémité orientale était vierge. Quelque part dans ces contrées inexplorées se cachaient les Vardens. Au sud se trouvait le Surda, un petit pays qui avait fait sécession d’avec l’Empire après la chute des Dragonniers. Eragon avait eu vent de rumeurs affirmant que le Surda soutenait les Vardens.

Près de la frontière est du Surda s’étirait une autre chaîne je montagnes appelée Beors, évoquée dans de nombreuses légendes. On disait qu’elles étaient dix fois plus hautes que la Crète. Sans doute une exagération. À l’est des Beors, la carte était vide.

Les côtes du Surda étaient bordées par cinq îles : Nía, Parlim, Uden, Illium et Beirland. Nía n’était guère plus qu’un amas de pierres émergé ; en revanche, Beirland, la plus grande des îles, comptait une petite ville. Plus loin, au large de Teirm, une île aux contours irréguliers portait un drôle de nom : Dent-de-requin. Au nord, il y avait une autre île, immense, dont la forme rappelait celle d’une main noueuse. Eragon connaissait son nom : c’était Vroengard, terre ancestrale des Dragonniers, jadis lieu de gloire, aujourd’hui carapace vide, pillée, hantée par des monstres étranges. Au centre de Vroengard, on remarquait la cité abandonnée de Dorú Areaba.

Carvahall n’était qu’un petit point à la limite ouest de la vallée de Palancar. Au même niveau, mais de l’autre côté des plaines, s’étendait la forêt de Du Weldenvarden. Sa partie orientale n’était pas dessinée sur la carte. Les franges occidentales de cette forêt y figuraient, mais son cœur demeurait mystérieux. Elle était plus sauvage que celle de la Crête. Les rares individus qui avaient bravé ses profondeurs en étaient revenus fous à lier… quand ils étaient revenus.

Eragon frémit en voyant Urû’baen, au centre de l’Empire. C’est de là que le roi Galbatorix gouvernait l’Alagaësia, assisté par Shruikan, son dragon noir.

Le garçon plaça son doigt sur la ville :

— Les Ra’zacs sont sûrs de pouvoir se cacher, ici !

— J’espère pour toi que ce n’est pas leur seul repaire, rétorqua Brom. Sinon, tu n’as aucune chance de les approcher.

Il défroissa la carte, qui craqua sous ses mains fripées.

Jeod sortit le parchemin de sa bourse et le parcourut :

— D’après nos notes, au cours des cinq dernières années, des chargements d’huile de Seithr ont été livrés dans toutes les grandes villes de l’Empire. Apparemment, tous étaient destinés à de riches joailliers. Je ne sais pas trop comment dépouiller cette liste sans informations supplémentaires.

Brom balaya la carte de la main :

— Nous pouvons déjà éliminer quelques villes. Les Ra’zacs doivent se déplacer partout où le roi a besoin de leurs services, et je suis sûr qu’il ne s’en prive pas. Donc, s’ils s’attendent à être requis n’importe où et à tout moment, leur quartier général doit se situer au carrefour de grands axes, d’où ils peuvent gagner facilement chaque recoin du royaume.

Arpentant la pièce de long en large, le conteur poursuivit d’un ton animé :

— Limitons-nous à celles qui sont assez grandes pour que les Ra’zacs aient moyen de s’y dissimuler. De plus, elles doivent être assez fréquentées pour que des commandes inhabituelles – par exemple de la nourriture appropriée à leurs montures – ne soient pas remarquées.

— Je suis d’accord, dit Jeod en opinant. Dans ces conditions, nous laisserons de côté la plupart des cités du Nord. Je ne pense pas que l’huile ait remonté la côte jusqu’à Narda : la ville est trop petite. Parmi les grandes, il y a Teirm, Gil’ead et Ceunon. Éliminons Teirm : je sais qu’ils n’y sont pas. Ceunon me paraît trop isolée. Reste Gil’ead.

— Les Ra’zacs y sont peut-être, signala Brom. Ça ne manquerait pas d’ironie.

— En effet…, fit le marchand.

— Et les villes du Sud ? intervint Eragon.

— Eh bien…, dit Jeod, il y a Urû’baen, évidemment, mais je n’y crois guère. Si quelqu’un devait mourir par l’huile de Seithr à la cour de Galbatorix, un comte ou n’importe quel petit seigneur aurait tôt fait de découvrir que l’Empire est un grand consommateur de ce poison. Toutes les autres villes importantes sont des destinations envisageables.

— Pas toutes, rectifia Eragon. Il n’y a pas eu d’envoi dans chacune d’elles. Nous n’en avons relevé qu’à Kuasta, Dras-Leona, Aroughs et Belatona. Kuasta, coincée entre la mer et les montagnes, ne convient pas aux Ra’zacs. Aroughs est bien un nœud commercial, mais elle est aussi isolée que Ceunon. Nous n’avons plus que Belatona et Dras-Leona, qui sont assez proches l’une de l’autre. Entre les deux, je parie pour Dras-Leona. Elle est plus grande et mieux située.

— Et c’est par là que transite l’essentiel des richesses de l’Empire, à un moment ou à un autre, y compris celles qui viennent de Teirm, confirma Jeod. Ce serait une excellente cachette pour les Ra’zacs !

— Dras-Leona, donc…, dit Brom en s’asseyant et en allumant sa pipe. Qu’avons-nous trouvé dans les archives, à son sujet ?

Jeod relut le parchemin :

— Voyons voir… Au début de l’année, trois cargaisons d’huile de Seithr ont été acheminées à Dras-Leona, à deux semaines d’intervalle, et par le même marchand. Un phénomène identique s’est produit l’année précédente, et l’année d’avant aussi. Je doute qu’un bijoutier – ou même une confrérie de bijoutiers – ait eu assez d’argent pour s’offrir autant d’huile.

Brom leva un sourcil :

— Qu’en est-il de Gil’ead ?

— Elle est moins bien reliée au reste de l’Empire. De plus…

Jeod tapota le parchemin :

— Ils n’ont reçu que deux chargements d’huile au cours des dernières années.

Il réfléchit un instant et ajouta :

— Et nous oublions Helgrind.

Brom acquiesça :

— Ah, oui, les Portes Noires ! Cela fait des années que je n’y avais pensé. Tu as raison, voilà qui renforce l’attrait de Dras-Leona pour les Ra’zacs… et voilà qui achève de me décider : c’est là-bas que nous nous rendrons.

Eragon s’assit brusquement, trop bouleversé pour demander ce qu’était Helgrind. « Je croyais que je serais heureux de reprendre la chasse, songea-t-il. Au lieu de quoi, j’ai l’impression qu’un abîme s’ouvre devant moi. Dras-Leona est si loin. »

Le parchemin craqua de nouveau quand Jeod roula la carte avec lenteur. Il la tendit à Brom :

— Vous en aurez besoin, à mon avis. Votre expédition va vous entraîner dans des régions mal connues.

Brom hocha la tête et accepta le cadeau. Jeod lui donna une bourrade :

— Ça me fait mal au cœur de vous laisser partir seuls ! Le cœur me pousse à vous accompagner, candis que la raison me rappelle mon âge et mes responsabilités.

— Je sais, dit Brom. Mais tu as une vie à Teirm. C’est à la nouvelle génération de continuer le combat. Tu en as assez fait. Sois heureux.

— Et toi ? Ta route n’aura donc jamais de fin ?

Un rire jaune s’échappa des lèvres de Brom :

— Je la vois venir, mais ce ne sera pas tout de suite.

Il éteignit sa pipe, et tous les trois se retirèrent dans leur chambre. Ils étaient épuisés. Avant de s’endormir, Eragon contacta Saphira pour lui conter leurs aventures de la nuit.

Eragon
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